
Peut-on changer l’histoire ?
L’histoire alternative dans l’Uchronie de Charles Renouvier
(M. Clavel-Lévêque, L. Lévêque), Arcidosso, Effigi, 2025.
Le récit uchronique, genre aujourd’hui très en faveur dans toutes les littératures du globe, tire son origine de l’unique texte de fiction écrit par le philosophe Charles Renouvier : l’Uchronie (l’utopie dans l’histoire), esquisse historique apocryphe du développement de la civilisation européenne tel qu’il n’a pas été, tel qu’il aurait pu être. Publié en deux temps, en 1857 et en 1876, le texte, souvent cité pour avoir consacré l’invention du terme uchronie, mais rarement lu, est inséparable d’une conjoncture qui, des lendemains de 1848 au coup de force du Deux Décembre et aux débuts contrariés de la Troisième République, est vécue comme celle des occasions manquées. À l’heure où, désespérante, l’Histoire se referme, l’Uchronie s’emploie à lever les blocages qui la grèvent, forte d’une histoire alternative où d’heureuses bifurcations – des temps qui auraient pu être aux temps qui pourraient être – rouvrent l’avenir. Car si Renouvier use de Rome pour interroger les utopies avortées qui ont jalonné le XIXe siècle, c’est très au-delà, jusque dans notre propre modernité, que son Uchronie invite à penser les futurs possibles. Revisitant le passé pour rouvrir l’avenir, l’uchronie – aujourd’hui partie intégrante de tout un champ des études historiques qui mobilise le pouvoir heuristique de l’histoire contrefactuelle –, du fait de son refus des logiques unilatérales et de la dictature du fait accompli, se trouve confirmée dans ses capacités à penser le monde.
Pouvoirs du what if ? dont cet essai s’attache à suivre l’efficacité en dépliant le système hypothétique qui fonde les futuribles pour en restituer les incidences, philosophiques comme socio-politiques.

Patrimoine(s) et territoire(s)
(V. Fumaroli, L. Lévêque, V. Michel-Fauré dir.), Arcidosso, Effigi, « La Recherche en Actes », 2024.
S’inscrivant au cœur des débats actuels sur le devenir des territoires, affrontés à des enjeux économiques qui ont affecté les cadres et les modes de vie, cet ouvrage aborde les nouveaux équilibres territoriaux qui ont engagé la définition des espaces « rurbains » et « périurbains ».
Les contributions ici réunies se veulent un voyage à travers la ville, ce lieu du vivre-ensemble. Elles explorent son urbanisme gros d’une histoire vivante et souvent bousculée, des processus de concentration qui ont marqué le XIXe siècle aux préoccupations esthétiques du XXe, traversant les espaces innommés de ce qu’on a pu appeler la « France moche », si loin de la smart city à haute valeur patrimoniale. Et, de la Provence au Languedoc, sont interrogés, au fil de la balade, le devenir de nos territoires à l’aune du changement climatique, qui impose, pour préserver la biodiversité, de réexaminer les choix culturaux, les politiques de gestion, notamment des espaces sensibles – littoral maritime et zones humides –, et les voies de développement qui, face à l’essor touristique, commandent de repenser projets de préservation, protection et valorisation du patrimoine paysager, rural et urbain.

La Méditerranée, terre de liens
(C. Bastidon-Gilles, S. Izzo, S. Gorgievski, M. Leopizzi, L. Lévêque V. Michel-Fauré) dir., Arcidosso, Effigi, « La Recherche en Actes », 2024.
Les contributions ici rassemblées couvrent sept siècles d’Histoire, du quatorzième au vingt-et-unième siècle ; un espace géographique allant de la France au Maroc et de l’Espagne au Liban ; et sept disciplines principales, de l’Océanographie à l’Histoire et l’Économie, de la Philosophie et du Droit aux Arts et Lettres. Elles appréhendent la Méditerranée terre de liens à partir de trois perspectives spécifiques. La première, consacrée aux « Flux, reflux, circumnavigations : un bassin en partage », a pour objet la construction de l’espace méditerranéen naturel et institutionnel par la diffusion des événements des chocs et des transitions écologiques, religieux, juridiques et économiques. La deuxième perspective adoptée, intitulée « Topologies méditerranéennes : habiter en Méditerranée », explore des topologies méditerranéennes spécifiques, qui ne sont jamais sans rapport non plus avec l’environnement naturel et institutionnel, régional et global, dans lequel elles sont inscrites. Enfin, la troisième et dernière perspective, consacrée aux « Typologies méditerranéennes : créer en Méditerranée », suit les traces des connectivités méditerranéennes de la création. Tracées par les courants artistiques, bi-directionnelles du culturel au naturel et du présent à l’histoire jusqu’à l’Antiquité, et finalement subsumées au présent par la méta-création, ces connectivités restituent l’écho de la stratification des topologies méditerranéennes et fournissent une lecture propre de leur dissociation.

Utopies, uchronies, rétrofuturismes. Transmondes, nouveaux mondes, antimondes
Sous la direction scientifique de Valérie Michel-Fauré, 2024.
Comment explorer histoires et mondes parallèles, temporalités alternatives ?
De l’Utopie de Thomas More, source inspiratrice, aux voyages en dystopies, uchronies, ou rétrofuturismes, notre rapport au temps et à l’espace de l’Histoire s’est considérablement transformé depuis la seconde moitié du XVIIIe siècle. D’un temps universaliste structurant, une accélération s’est opérée au XIXe siècle, puis une relativité a marqué le XXe siècle, et une expansion postmoderne imprègne le XXIe siècle. L’enjeu de cet ouvrage est d’interroger et d’analyser de multiples passés vers différents futurs, dans un présent évolutif, impalpable. Ce parcours singulier entre transmondes, nouveaux mondes et antimondes, s’est déroulé lors du colloque organisé à l’Université de Toulon les 17 et 18 novembre 2022. Les réécritures inédites et narrations transmédias ainsi étudiées remettent en question nos récits civilisationnels, nos repères symboliques et réflexifs. Ces multivers, entre réalité et imaginaire, ont réinterprété l’Histoire et nos histoires individuelles et collectives, constructions et projections, métaphores et métamorphoses culturelles, sociales et politiques.
L’intérêt de ces regards croisés réside dans la diversité des contributions abordant la science-fiction, l’anticipation, dans le champ de la littérature, des arts du spectacle et de la représentation. Ces futurs à rebours, entre fiction et réel, s’éprouvent à travers des temporalités et continents multiples : des récits mythiques de H. G. Wells et d’Ian Fleming aux utopies réalisées d’Alain Damasio en passant par les chroniques post-humaines de Floryan Varennes, la chronopathie selon Montaigne, l’uchronie noire de Mulisch, les rétro/hétérotopies des séries néo-victoriennes, les sens et contresens de Robida, les visions futuristes de Berlioz et Adam, les autofictions de Gibson, Bilal et Moebius, le meilleur des mondes d’Huxley, le post-exotisme de Volodine, la littérature alternative de Belkhodja à Waberi, les métaphores traumatiques de Mayorga, les dystopies de Dantec à Tiqqun, les mondes psycho-apocalyptiques de Lopouchanski, les utopies postcoloniales de Resnick et Miano.
Ces auteurs se positionneraient-ils comme des lanceurs d’alertes ?

Artistes et territoire, Le processus de création comme refuge d’hospitalité. L’exemple du projet Chuchotements de la Nature en ville
(Sasha Jouot), 2024.
Face aux enjeux actuels liés au changement climatique, comment la reconsidération du travail artistique et de ses méthodologies peut-elle contribuer à enclencher une mise en mouvement conjointe des acteur·ices de nos territoires ? Cette mise en mouvement visera à prévenir ces mutations en consolidant le lien social, favorisant les espaces de réflexions communes et en encourageant l’initiative citoyenne. Le projet Chuchotements de la Nature en ville est tout à la fois le lieu qui a appelé l’affleurement de cette question et le milieu qui a formulé des actions pour y répondre. L’ambition a été d’accompagner quatre jeunes artistes, Léandrine Damien, Lucas Irad, Lisa Jacomen et Estelle Ladoux, dans la réalisation d’oeuvres qui ont trouvé leur place sur le futur sentier métropolitain toulonnais. Pour mener à bien cette implantation, il a été nécessaire de mettre en dialogue municipalités, institutions, artistes, équipes technique et pédagogique. L’observation de ce maillage a servi de socle à cette réflexion. Comment s’est-il articulé ; quelles étaient les attentes et contraintes, tant explicites que latentes, interagissant avec le travail des artistes ; quel contour a été posé ; comment le processus de création s’est-il trouvé être un premier espace d’hospitalité ? Cette publication s’est construite à la lenteur d’une marche, oscillant entre glanage d’éléments de compréhension du milieu traversé et ouverture à la rencontre de l’autre. Le tout s’est déployé en prenant le risque de suivre un sentier en cours de balisage.

La dignité des vaincus, Luigi Campolonghi dans la circulation des idées de son temps entre France et Italie (1898-1945)
(Mattia Ringozzi), 2024.
Sans prétendre à l’exhaustivité, cet ouvrage entend concourir à faire sortir de l’oubli la pensée et l’action de Luigi Campolonghi (1876-1944), personnalité majeure de l’émigration économique et politique italienne en France. L’étude du parcours de Campolonghi au sein du milieu de l’émigration, de la fin du XIXe siècle à la Seconde Guerre mondiale, permet de saisir l’émergence et l’affirmation d’un mode alternatif de lutte, contre le régime fasciste notamment. Personnalité centrale dans les réseaux intellectuels et politiques franco-italiens, Campolonghi a été porteur d’un socialisme syncrétique, démocratique et réformateur. Mêler l’étude de l’engagement et des idées politiques à l’analyse littéraire a permis de mettre en relief le lien entre l’action politique et la production littéraire. À travers son activité journalistique, Campolonghi vise notamment à divulguer une véritable « pédagogie civique » pour favoriser l’intégration des travailleurs italiens en France. C’est à la pauvreté morale et matérielle des classes subalternes qu’il entend donner la parole, aux « vaincus », porteurs de la douleur de la défaite et de la dignité d’une vie passionnée vécue sans jamais baisser la tête.

Babel, Littératures plurielles, n° 49 : Penser la connectivité de l’espace méditerranéen, 1er semestre 2024
(Sandra Gorgievski, Sara Izzo, Marcella Leopizzi, L. Lévêque V. Michel-Fauré dir.).

Éco-culture(s) en question(s). Repenser le patrimoine. L’innovation au service des territoires
(L. Lévêque, V. Michel-Fauré, C. Bastidon-Gilles dir.), Arcidosso, Effigi, « La Recherche en Actes », 2023.
Comment interroger les éco-culture(s) à partir à partir du territoire et du patrimoine pour y repérer l’innovation, apprécier les formes et les lieux de son intervention et évaluer la portée de son/ses implication(s), tels sont les champs que cet ouvrage tente d’explorer collectivement.
Dans le cadre de l’arc nord-méditerranéen, en Espagne, France, Italie, Roumanie, sont abordées dans la longue durée de l’histoire comme dans les turbulences de l’actualité les mutations qui affectent inégalement les territoires – du domaine, au village, à la commune, au pays, à la région – dans les enjeux de développement.
Ont été suivis les rythmes et la diffusion des innovations, du gisement archéologique, à l’entreprise, privée ou publique, coopérative ou individuelle, en mesurant les freins qui peuvent naître des rapports entre acteurs sociaux, législation, administration et contexte politique.
Au prisme de parcours singuliers, les possibilités de conjuguer économie soutenable et patrimoine, du local au global, sont analysées en Languedoc et en Ombrie, les expériences mises en œuvre pour réinvestir le patrimoine permettent de suivre les batailles qu’il faut parfois mener, en France comme en Roumanie et en Espagne, pour préserver et valoriser sites et centres historiques et faire du patrimoine repensé un outil d’innovation pour réinventer des territoires plus harmonieusement partagés entre ceux qui y vivent et ceux qui les visitent.

Le rouge ou le noir ? Quand la fiction futurologique française prophétisait des lendemains qui (dé)chantent (1800-1975)
(L. Lévêque), Arcidosso, Effigi, 2023.
« De quoi demain sera-t-il fait ? » s’interrogeait, en 1835, Victor Hugo dans des Chants du crépuscule dont on sait que le dernier terme revêtait alors un sens profondément duel, susceptible de signifier aussi bien le point du jour que le couchant. Alors, les temps étaient-ils à l’aurore ou au crépuscule ? Cet horizon indiscernable, beaucoup le scrutent aussi, cherchant à y apercevoir, comme Chateaubriand à pareille époque, « l’Avenir du monde », un avenir passablement brouillé depuis que la Révolution française a jeté à bas des certitudes téléologiques millénaires, libérant une inquiétude eschatologique majeure, sinon sans précédent, qui agite douloureusement consciences et imaginaires. En témoigne un foisonnant corpus de textes souvent méconnus qui entreprennent d’éclairer cet avenir dont une petite centaine, couvrant le XIXe et une bonne partie du XXe siècle, est ici examinée. Pris en tenaille entre les deux grandes postulations mythiques que sont le progrès et la décadence, l’avenir est préempté tantôt du côté d’une nouvelle genèse tantôt du côté d’une retentissante apocalypse, engageant, entre éternel retour, prométhéisme conquérant ou fin des temps, des régimes d’historicité pluriels et des lectures politiques qui ne le sont pas moins. Entre béates utopies et dystopies féroces qui accouchent qui du meilleur des monde et du bon gouvernement, qui de l’enfer sur terre, du phalanstère à la caserne et à la prison, du philanthropisme au totalitarisme, de l’âge d’or au globocide, cette littérature futurologique de l’ère capitaliste est riche de ce que Walter Benjamin appelait des images dialectiques, vibrantes de tension, expressions de passages historiques qui ouvrent tant sur des lendemains qui chantent que sur les faisceaux plus sombres de l’aube dorée.

Juifs de Libye. Constellations de mémoires
(Piera Rossetto), Arcidosso, Effigi, coll. « Littératures, Cultures, Sociétés », 2023.
À la fin des années 1960, au moment où les derniers juifs du pays s’en vont, historiquement, culturellement et politiquement, la Libye se trouve à un carrefour. Au lendemain de la proclamation de l’indépendance du pays, en 1951, la Libye s’était déjà vu projeter dans une dimension internationale, ce que la découverte et l’exploitation du pétrole, quelques années plus tard, n’ont fait qu’accroître.
Quelle était la place des juifs dans un pays en proie à de rapides mutations ? Comment se positionnaient-ils face à un cosmopolitisme en regain et aux styles de vie afférents ? Comment envisageaient- ils leur vie en Libye ? Et comment se la représentent-ils aujourd’hui, soixante ans (et plus) après leur départ ? Croisant différentes disciplines, sources et langues, Juifs de Libye. Constellations de mémoires interroge le cas, encore peu connu, des communautés juives libyennes à l’époque contemporaine. De récit en récit, d’objet en objet, de lieu en lieu, c’est une toile dense d’imaginaires et de mémoires qui prend forme et nous laisse entrevoir, entre espace privé et récit public, le « fait juif libyen » dans ses longs ancrages et redéploiements successifs.

Albert Camus, le poids de la colonie
(Christiane Chaulet Achour), Arcidosso, Effigi, « Littératures, Cultures, Sociétés », 2023.
En finit-on jamais avec Camus ? Non, car je suis persuadée qu’une critique non hagiographique de l’écrivain finira par être lue et enregistrée et permettra de donner d’autres contours à son profil, non pour l’éliminer du champ littéraire mais pour lui donner sa place dans le contexte où il a vécu et écrit.
Ce contexte est celui de l’Algérie de son époque, dans l’ample mouvement de colonisation / décolonisation, dans le vécu d’une guerre violente et d’une terre célébrée dans certains de ses contours, à partir de ce qu’il a toujours revendiqué être : un Français d’Algérie. Ces années sont les dernières de l’Algérie coloniale et celles de sa remise en cause par la guerre de libération des Algériens. Relire ses oeuvres qui ont pour cadre l’Algérie, l’escorter avec des contemporains qui interpellent le réel d’alors autrement, l’accompagner avec ses épigones et admirateurs, comprendre l’icône qu’il est devenu dans la littérature française, sont les préoccupations constantes de cet essai.
Le 16 octobre 1957, le prix Nobel lui est décerné à Stockholm au moment même où la « Bataille d’Alger » connaît son terme, dans la violence et la répression, par l’intervention du général Massu et de ses troupes. On sait que cette année 1957 – dont il est question plus d’une fois dans les pages de ce livre – a bien été « insensée » au sens premier de « contraire au bon sens » mais non « insensée » dans le contexte de la résistance algérienne et de la répression qui entend la démanteler. Comment écrire et témoigner avant, pendant et après une telle intensité historique ?

Paysages en mouvements
(V. Michel-Fauré dir.), Arcidosso, Effigi, La Recherche en Actes, 2023.
Cet ouvrage propose un parcours non exhaustif des différentes actions théoriques et artistiques de ce projet transversal de recherche-création, recherche- action, réunissant arts et sciences : conférences, journées d’études, séminaires, workshops, résidences, films, expositions, territoires d’expérimentations entre 2020 et 2023. Paysages en mouvements a pour objet de restituer les regards croisés des différentes démarches développées par créateurs, enseignants-chercheurs, acteurs de la recherche et des paysages ainsi explorés. Des scénarios potentiels tissant des liens entre terre et mer, entre les différents « mondes » du vivant, des narrations spéculatives et fictions transmédia ont été réalisés. Cette recherche interdisciplinaire met en oeuvre de nouvelles méthodologies et concepts à la croisée du sensible, de l’art et de l’écologie. Elle explore les frontières, frictions et tensions entre conservation, restauration et création, impliquant une réflexion partagée avec les acteurs vivant sur des territoires sensibles ou résilients, entre espaces habités, mer et forêts, forêts et jardins, terrestres ou sous-marins. Ce programme interroge la vie politique, sociale, économique, en vue d’hybrider, de fertiliser nos imaginaires pour construire des espaces de débat sur d’autres registres que des approches analytiques, dualistes du monde. Il questionne aussi les enjeux posés par les notions de patrimoine culturel et naturel, matériel et immatériel aujourd’hui. Cette mise en réseau réflexive et artistique a permis la mise en oeuvre d’un décloisonnement entre les différents récits prospectifs au sein des diverses disciplines artistiques, enquêtes et spéculations scientifiques. Les rencontres ont permis d’analyser et partager lexiques, registres, outils et méthodologies du monde de l’art, la littérature à celui des sciences humaines, sciences cognitives et sciences dures. Les différentes actions ont généré une mise en pratique de ces concepts et de cette transversalité élaborée en latéralités par une production artistique et réflexive, faisant émerger de nouveaux formats, des modalités inédites et innovantes d’enquêtes, de restitution de la recherche artistique, singulière ou plurielle donnant forme aux projections multiples générées par la transition écologique.

La Crise dans tous ses états. Regards critiques
(L. Lévêque, S. Visciola, C. Bastidon-Gilles, D. van Hoorebeke dir.), Arcidosso, Effigi, « La Recherche en Actes », 2023.
Impossible, aujourd’hui, de faire l’économie de la crise : que l’on ouvre son journal ou que l’on pousse le bouton de sa télévision, l’on est abreuvé de discours alarmistes qui agitent le spectre de la crise dans tous ses états : climatique, écologique, politique et géopolitique, économique et financière, institutionnelle, sociale, migratoire, énergétique, nucléaire…. Protéiforme, la crise est aussi omniprésente, saturant l’espace médiatique, infiltrant des consciences qui, progressivement mithridatisées, gèrent leur angoisse entre fatalisme et combativité, paralysie et commotion.
Car d’aucuns, comme Evelyne Grossman, parient sur la«créativité de la crise », assignant à cette dernière un clair pouvoir heuristique auquel en appelait, dans les années 1980, l’émission « Vive la crise ! », cultivant une ambiguïté dont, pas plus que de la crise, nous ne sommes aujourd’hui sortis si, comme Anita Staroń en pose fermement le diagnostic, « le sujet est loin d’être épuisé et […] appelle de nouveaux questionnements ». C’est à un certain nombre d’entre eux que les contributions ici réunies entendent modestement apporter des éléments de réponse.

Les routes de l’information de Rome à Internet. Flux, croisées, ornières
(L. Lévêque, S. Visciola, C. Bastidon-Gilles, D. van Hoorebeke dir.), Arcidosso, Effigi, « La Recherche en Actes », 2023.
À la croisée des routes, la connectivité est constitutive de l’espace méditerranéen et de la manière de le penser. Dans une perspective historique embrassant deux millénaires, le présent volume explore ces routes, matérielles et immatérielles, depuis l’acte fondateur de la Méditerranée institutionnelle par l’expansion des ramifications de l’Empire romain, jamais complètement effacée par la superposition des strates d’intégration et de désintégration successives ; jusqu’au développement des routes contemporaines de l’information.
Les routes sont aussi méthode. Le champ d’application des modèles de graphes est large, depuis la transmission des chocs économiques et financiers, jusqu’à la formation et au renouvellement de l’opinion dominante et aux transitions institutionnelles dont ce renouvellement s’accompagne, en passant par l’élaboration du droit. Les contributions de la première partie du présent volume offrent une perspective de la capacité de ces modèles à aborder les dynamiques méditerranéennes, qui se prêtent mal à l’abstraction d’un développement unilinéaire et cumulatif.
En même temps que méthodes, les routes, et en particulier celles inscrites dans l’histoire longue comme constitutives du patrimoine méditerranéen archéologique et architectural, sont ici sujet. Routes qu’il s’agit de révéler, au sens photographique du terme, que le passage du temps les ait effacées au regard, ou que leur visibilité toujours apparente ne suffise pas à en restituer la pleine dimension patrimoniale. En ce sens, la seconde partie du présent volume s’inscrit pleinement dans la dynamique de renouvellement des approches croisées du patrimoine et du développement local.

Romans algériens au tournant des XX et XXI siècles. Une littérature au-delà de l’imminence
(Salah Ameziane), Arcidosso, Effigi, coll. « Littératures, Cultures, Sociétés », 2023
Que peut la littérature face aux situations extrêmes ? Que peut-elle face à l’accélération de l’Histoire ?
Ces questions conduisent ce livre qui analyse l’expérience historico- littéraire algérienne post-1989. Mesurée à une condition impérieuse, la forme romanesque propose des réponses narratives pour inscrire et surtout extraire cette épreuve de toute clôture. L’écriture s’éprouve à absorber l’événement, à aliéner sa violence, réévaluant ainsi la vertu de la trace et l’apport du filtrage littéraire. Cette riposte livresque offre une texture au présent, façonne sa mémoire immédiate. Elle est éminemment contemporaine dans la mesure où elle se confronte à l’obscurité de son époque.
Adoptant de nombreuses strates narratives, les oeuvres étudiées convoquent l’Histoire passée, tissent la trame d’un épilogue tragique : la terreur intégriste. Dans un jeu de miroirs constant qui séquence et littérarise la trajectoire du pays, replacée dans sa longue durée, les écrivains comblent les béances de la mémoire collective pour contrarier l’écueil du repli, le péril de l’amnésie. Ainsi, dans la démarche créative se prolonge un besoin réflexif.
Dans cette rétrospection romanesque, le parcours historique épouse le réexamen narré du cheminement culturel du pays. Plus qu’une connaissance subjective du passé, la mémoire cultivée par les auteurs s’avère source de résistance-résilience, convertissant les discontinuités vécues en chance d’adaptation, dans un effort de recouvrement ouvert à l’altérité comme enjeu essentiel. La “greffe francophone” se découvre nourrie et assainie, car, au-delà de sa précieuse contribution, le roman sollicite et reconsidère son antériorité et ses filiations, revendiquées et légitimées.

Crise climatique et sciences humaines
(S. Brodziak, H. Manuelian, D. Masson dir.), Arcidosso, Effigi, La Recherche en Actes, 2023
La crise climatique et environnementale n’est plus à notre porte. Elle est bien présente : rapports, études, mouvements citoyens ne cessent de la constater. Depuis le premier rapport du GIEC publié en 1990, le réchauffement planétaire n’a pas diminué, et, en 2023, l’optimisme climatique n’est pas à l’ordre du jour. Les États, les gouvernements, les institutions diverses et variées et les populations doivent impérativement en prendre conscience parce que, comme le soulignent les Nations Unies : « Les changements climatiques sont la question déterminante de notre époque et nous sommes à un moment décisif. De l’évolution des conditions météorologiques, qui ont des effets sur la production agricole et alimentaire, à l’élévation du niveau des mers, qui augmente les risques d’inondations, les conséquences des changements climatiques sont mondiales en termes d’effets et d’échelle. Sans action immédiate, il sera beaucoup plus difficile et coûteux de s’adapter aux conséquences futures de ces changements ».
Face à cette urgence, quel rôle peuvent jouer les Sciences humaines ? En quoi peuvent-elles aider à repenser la relation que nous entretenons individuellement et collectivement avec l’environnement ? Comment peuvent-elles travailler à modifier les représentations et les comportements ? Sur le front de la prise de conscience, aux côtés de l’histoire, de la géographie, de la linguistique et des écritures de création, la littérature sous toutes ses formes et tous ses genres, en explorant les savoirs scientifiques sur le terrain des imaginaires, monte, de toute évidence, en première ligne.

Voyage sur le littoral du cap Bénat au Cap Canaille
(Cécile Pamart), Arcidosso, Effigi, « Microcosmi dei luoghi », 2023.
Il existe un petit bout de littoral sur la côte Sud-Est, du cap Bénat au cap Canaille, qui, jusqu’à il y a peu, était presque complètement ignoré, malaimé même. En son centre, la ville de Toulon. Ne disait-on pas « Toulon – Ville sans renom – Hommes sans honneur – Femmes sans pudeur – Montagnes sans verdeur – Rivières sans fraîcheur » ?
Cet ouvrage s’adresse à tous ceux qui ont envie de découvrir ou redécouvrir ce littoral autrement, de faire un véritable voyage à travers ses paysages. Car ceux-ci sont une mémoire. Ils ne sont pas simplement laids ou beaux, étrangers et froids tels quelque chose auquel on n’appartient pas mais véhiculent une histoire des relations entre le milieu et les humains qui l’ont habité, parcouru, des émotions, des valeurs. Ils nous relient, à travers les époques, à notre espace.
Ce livre raconte donc des histoires, celles d’un territoire d’une richesse prodigieuse, pour ainsi tisser un lien charnel, une forme de beauté propre à faire naître de l’émerveillement.

La femme orientale : mythes, imaginaires, représentations
(H. Bkhairia, F. Lacoste, L. Lévêque dir.), Arcidosso, Effigi, « La Recherche en Actes », 2022.
Topos s’il en est, la femme orientale enfièvre l’imagination et échauffe les esprits, occidentaux singulièrement, pour qui elle est un objet de fantasme toujours renouvelé. En témoignent toute une littérature orientaliste et colonialiste qui s’attache à percer son mystère et toute une iconographie qui, de Delacroix à Fromentin ou à Matisse, en fixe l’imagerie formulaire sur fond de harem et de bains maures où paressent de sensuelles odalisques et ondulent lascivement des almées.
Femmes-objets, tout entières vouées au plaisir masculin, ces femmes d’Orient sont d’autant plus attirantes qu’elles sont inaccessibles, recluses en leur sérail ou dissimulées sous un voile qui, en ne laissant voir que des yeux de braise, attise le désir plus qu’il ne l’interdit.
C’est toute cette typologie, largement cristallisée en poncifs et durcie en fantasmatique, qui se trouve ici reprise et dépliée comme est aussi revisité l’autre versant de l’Orientale dont, avec Shéhérazade, les Mille et Une nuits montrent qu’elle est loin de n’avoir qu’un visage mais qu’elle peut aussi être cette femme puissante qui déjoue les scénarios préétablis, faisant passer son pouvoir de séduction du corps à la tête.

Babel, Littératures plurielles, n° 46 : Insularité(s), 2nd semestre 2022
(Sous la direction de Valérie Michel-Fauré), 2022.

La voix du mythe. Des voies littéraires contre les fissures de Babel
(Ch. Chaulet Achour, L. Lévêque dir.), Arcidosso, Effigi, « La Recherche en Actes », 2022.
Sans reprendre ici la démarche structurale du Lévi-Strauss de Mythe et signification, les contributions ici réunies entendent néanmoins explorer son fonctionnement symbolique et contribuer à penser à nouveaux frais la fonction et l’usage du mythe en contexte littéraire.
Ouverte à un corpus très large tant au niveau des aires temporelles que géographiques et culturelles considérées, la réflexion questionne les présupposés les plus accrédités sur les rapports du mythe à l’universel.
S’inscrivant en faux contre une vision ethnocentriste qui réduit bien souvent la mythologie à ses seules expressions gréco-latines classiques, sans exclusive, ce collectif s’intéresse à des formes à la fois actualisées et excentrées du mythe dont il suit le travail et les rebonds incessants, interdisant de réduire l’imaginaire mythique à un fonds d’images et de procédés académiques figés.
Revitalisant les considérations d’un Baudelaire qui voyait dans « la mythologie […] un dictionnaire d’hiéroglyphes vivants », soit la clé du grand code des arcanes de l’humain et de son histoire, ce volume retrouve après lui dans la voix du mythe « des concentrations de vie nationale, comme des réservoirs profonds où dorment le sang et les larmes des peuples ». Une voix primordiale qui sourd des profondeurs, voix non plus du passé mais des recommencements.

Le Sens de la fête
(L. Lévêque dir.), Arcidosso, Effigi, « La Recherche en Actes », 2021.
Au-delà des réjouissances privées qui rythment nos vies, la fête investit massivement l’espace public. Cérémonies ritualisées, processions, défilés, commémorations, festivals… d’essence religieuse ou politique, les festivités, récurrentes ou non, scandent la vie civile, occupent l’espace et règlent le temps, profane comme sacré, à travers des éphémérides qui prennent sens à l’aune de ces célébrations.
Miroir sensible d’une société, le calendrier rend compte de la représentation qu’elle a d’elle-même, qui en est aussi l’ordonnateur des valeurs civiques et comme le baromètre, dans la balance qu’il tient entre les registres spirituel et temporel comme dans les recompositions qu’il marque entre promotions et déménagements.
L’histoire des fêtes livre une histoire sociale, à la fois culturelle et politique, que l’on suit ici en longue diachronie de la Grèce antique aux jeunes États-Unis, de la France à l’Espagne ou l’Italie. Entre fêtes pastorales, année liturgique, fêtes populaires, triomphes, entrées royales, fêtes civiques et nationales… c’est un très large éventail de festivités qui est ici parcouru pour offrir au lecteur la compréhension la plus fine de ce champ privilégié d’intervention du pouvoir.

La double vie du patrimoine. La culture dans la dialectique du visible et de l’invisible
(L .Lévêque, C. Bastidon-Gilles, Th. Santolini, S. Visciola dir.), Arcidosso, Effigi, « La Recherche en Actes », 2021.
« L’essentiel est invisible pour les yeux », disait Saint-Exupéry. C’est un peu le postulat de départ de ce livre qui applique la formule au champ du patrimoine culturel dans ses modalités, sinon toutes immatérielles, du moins sous-jacentes.
Enfouies dans le sein de la terre ou reposant au fond des mers, essaimant sur les ailes des mots, ricochant dans les arts, dans les traditions populaires, éclatant dans les fêtes, bruissant dans les marges d’un texte, gîtant dans les recoins de la mémoire, perçant dans les représentations…, c’est à ces manifestations, plus ou moins évanides mais d’une rémanence opiniâtre et que l’UNESCO a reconnues comme vecteurs d’un « sentiment d’identité et de continuité » liant populations, héritage et territoires que s’intéresse cet ouvrage.
Seize spécialistes venus d’horizons disciplinaires diversifiés lui ont apporté leur expertise et ont contribué à la réflexion, assumant dans toute sa rigueur le rôle patient du chercheur à la fois engagé dans l’interprétation scientifique des structures et dans leur appropriation par les acteurs de terrain et concourant ainsi doublement à revitaliser ce substrat identitaire que constitue, tant pour les individus que pour les sociétés, un patrimoine culturel aussi vivace que fragile, résistant à l’épreuve des siècles.

Les Territoires de l’aménité
(Ph. Gilles, L. Lévêque, C. Bastidon-Gilles, Y. Kocoglu), Arcidosso, Effigi, « La Recherche en Actes », 2021.
Aménité : du latin amoenitas (charme) qui signifie, à la fois, l’amabilité et la douceur dans le caractère et l’attitude de quelqu’un et, pour un lieu, son agrément. En reliant les deux termes de cette dualité, cette extension du terme d’aménité nous permet, au-delà d’une considération passive d’observation, d’en tirer une représentation satisfaisante et méthodique suivant laquelle les individus de même que notre milieu et nos ressources doivent être traités avec égard, ce qui devrait aller de soi, comme base élémentaire du respect de soi-même. Dès lors, les territoires d’aménités, lieux d’expression de celles-ci, doivent être préservés et partagés aux fins d’une transmission inter et trans générationnelle que ce soient, dans cet ouvrage, les vestiges et les monuments ; l’environnement, particulièrement maritime et singulièrement méditerranéen ; la collecte, la production et la diffusion de données ; l’urbanisme avec ses droits et ses devoirs ; ou les regards croisés de différents artistes sur notre région, la Méditerranée.

Babel, Littératures plurielles, n° 43 : Mer ou mur ? Pour une histoire connectée de la Méditerranée, 1er semestre 2021
(Ch. Chaulet Achour, L. Lévêque J. Serghini dir.)

Pour une histologie de la crise
(L. Lévêque, A. Staroń dir.), Arcidosso, Effigi, « La Recherche en Actes », 2021.
L’actualité ne le démontre que trop : on n’en a jamais fini avec la crise. Une crise qui, démentant toute l’histoire de la notion, tendrait même à devenir permanente. Plus complexe aussi, et la récente pandémie de Covid-19 qui tourmente la planète aura beaucoup fait pour mettre en évidence l’interdépendance de ses facteurs déclencheurs quand, en un gigantesque effet domino, on a vu s’enchaîner crise sanitaire, crise économique et sociale, crise politique et démocratique… seule la crise écologique trouvant fugacement son compte au coup de frein mis aux échanges planétaires.
Jouant comme un véritable révélateur, l’événement commande un regard critique que les 19 spécialistes qui ont contribué à ce volume se sont efforcés de porter dans les champs des sciences naturelles et de la médecine, de la philosophie, de l’histoire et de la sociologie, des sciences de l’éducation, de la littérature et des médias pour penser à nouveaux frais les questions qu’Edgar Morin soulevait voici un demi-siècle en forgeant le néologisme de « crisologie ». Crisologie que nous reprenons ici à notre compte en l’actualisant.

La Politique du crédit. Regards croisés Économie, Littérature, Droit
(N. Huchet, L. Lévêque, C. Bastidon-Gilles, Y. Kocoglu dir.), Arcidosso, Effigi, « La Recherche en Actes », 2020.
Le crédit n’est pas simple affaire d’argent, mathématique des taux d’intérêt ni même stricte transaction financière. Balzac le savait bien qui, en connaisseur intime des mécanismes de la dette, donnait pour épigraphe à son Art de payer ses dettes et de satisfaire ses créanciers sans débourser un sou, manuel du droit commercial à l’usage de tous les consommateurs sans argent,cette forte maxime que « plus on doit, plus on a de crédit ». Dissociant la solvabilité du jeu mécanique de l’escompte, c’était remotiver l’étymologie pour placer la confiance au cœur du dispositif du crédit, qu’il s’agisse d’emprunts privés ou publics. Si la crise des subprimes, la flambée des dettes souveraines comme le pouvoir exorbitant des agences de notations financières sont récemment venus le signifier, ces phénomènes ne sont pas propres à notre modernité libérale et le présent ouvrage s’attache à suivre en longue diachronie la lente mise en place de logiques de type capitaliste pour proposer une analyse fonctionnelle des politiques d’accès et de rationnement du crédit suivies jusque dans leurs effets structurels sur le secteur bancaire et sur les consommateurs.

Les Mille et une nuits aujourd’hui
(Christiane Chaulet Achour),Effigi, collection « Littératures, Cultures, Sociétés », 2020.
Cantonnées au monde arabe où elles se diffusaient par les voies de l’oralité, Les Mille et une nuits ont envahi le monde depuis la traduction d’Antoine Galland, au début du XVIIIe siècle, relayée par d’autres traductions, et les différentes éditions en langue arabe. Cet ouvrage qui leur est consacré veut apporter sa contribution à une meilleure connaissance des effets de cet espace de création au XXe siècle et en ce début du XXIe siècle. Car Les Nuits poursuivent leur voyage et les écrivains se nourrissent de leur apport. Dans l’immense bibliothèque de l’humanité, elles tiennent une place enviable. Des Shahrazade(s) contemporaines aux Bagdad(s) nostalgiques, des Sindbad(s), dont les voyages suggèrent la découverte du monde, aux écritures dont les narrations empruntent les détours et retours de la sultane, on ne compte plus les emprunts aux Nuits.
Face à la richesse du texte lui-même et des réécritures qu’il a suscitées, cet ouvrage a fait des choix pour mettre en valeur les dialogues et affrontements entre l’Orient et l’Occident, l’apport du Sud et la fascination qu’il exerce sur d’autres imaginaires.

Imaginaire(s) féminin(s), symboles et stéréotypes
(A. Makan, L. Lévêque dir.), Beni Mellal, Publications de l’Université Sultan Moulay Slimane, 2020, 368 p.
Dans la rencontre scientifique dont les Actes sont ici présentés, une place particulière revient à cet imaginaire féminin qui irrigue plusieurs axes de recherches, qu’il s’agisse d'(auto)biographies ou d'(auto)portraits de femmes, du corps de la femme dans les constructions intermédiatiques, des images ou des représentations de la femme dans l’imaginaire collectif, des stéréotypes identitaires de la femme, du combat pour la langue, des enjeux liés à l’écriture au féminin, de l’écriture féminine et des modèles (s) de (ré)conciliation avec l’autre genre…

Jules Verne, un lanceur d’alerte dans le meilleur des mondes
(L. Lévêque, A. Makan dir.), L’Harmattan, 2019.
Contre une vulgate tenace qui continue de célébrer en Jules Verne le thuriféraire aveugle du progrès, cet essai s’attache à remettre sous tension l’idée d’un Verne champion irréfléchi de l’entreprise humaine. Buissonnant dans le touffu massif vernien, il y puise de quoi déconstruire une image qui doit beaucoup à la politique éditoriale d’Hetzel, désireux d’arrimer les Voyages extraordinaires aux valeurs rationalistes, positivistes et expansionnistes qui dominent, tant sous le Second Empire que sous la Troisième République, une France lancée dans l’aventure industrielle et coloniale. Sans jamais néanmoins parvenir à étouffer les voix non autorisées qui, sous l’épopée alléguée de la science et de la technique, sous la geste des surhommes, comme en sous-main, travaillent contradictoirement l’écriture de Jules Verne. C’est à cette parole occultée, symptôme et expression d’un malaise dans la civilisation que ces pages entendent redonner voix : la voix d’un Jules Verne lanceur d’alerte devant la course à l’abîme et le naufrage éthique où s’enfonce un monde toujours plus polarisé, qui n’a pour gouvernail que l’impérialisme et le capitalisme sauvages.

Imaginaires, langages, visions du monde
(L. Lévêque, A. Makan dir.), Babel « Transverses », Arcidosso, Effigi, 2019.
Sans prétendre fournir des clés pour l’imaginaire à la manière d’Octave Mannoni, comme lui les contributions réunies dans le présent volume raccordent à la puissance évocatoire du langage, entre parole et langue et d’une langue à une autre, la fabrique d’univers qui ne sont pas que de mots mais dont la présence, tenace, tient à la force performative d’images qui donnent corps à cet imaginaire que Walter Benjamin investit en allumeur de mèche et dont il fait le ressort même de ce qu’il nomme passage, principe actif de connexion, vecteur de rapprochement entre les époques, les cultures et les hommes.

2000 ans de guerres en paix
(L. Lévêque dir.), Paris, L’Harmattan, 2018.
On discute encore de ce qui serait la traduction la plus pertinente du chef d’œuvre de Tolstoï : La guerre et la paix, où l’article défini aiguille vers une application limitée de ces termes, Guerre et paix qui, sans plus de déterminant, maximalise le jeu de ce couple antinomique en étendant l’horizon de son intervention ou, à faire jouer l’homonymie que sollicite la langue russe, La guerre et le monde, extension de champ terrifiante qui fait de la guerre un universel, donnant au passage la clé des rapports de subordination qui unissent guerre et paix ? Héraclite l’avait déjà dit : « Polémos est le père de toutes choses ». Un « monstre cruel » qu’Aristophane dénonce en pleine guerre sur la scène athénienne pour avoir dérobé et emmuré la Paix au fond d’une caverne profonde d’où le chœur des Panhellènes repentis s’employait à la récupérer pour toujours.
Sans polémique, mais sans se faire non plus illusion sur l’irénisme, ce volume envisage sur deux millénaires une dialectique de la guerre et de la paix qui prend la forme d’une succession de conflits à peine entrecoupés de paix qui ont la fragilité d’armistices, nonobstant, depuis l’abbé de Saint-Pierre jusqu’à Kant, force projets de paix perpétuelle dont l’esprit a soufflé sur les organismes chargés d’assurer la sécurité collective, de la SDN à l’ONU. Avec plus ou moins de réussite. Loin du bruit des armes, impuissantes à imposer la paix, les auteurs explorent ici d’autres pistes, qui tiennent à la mémoire des conflits, plaidant pour une gestion sans amnistie et sans amnésie de ces enjeux.

Circulations méditerranéennes : voies, réseaux, modèles
(L. Lévêque, A. Makan dir.), Babel « Transverses », Effigi, 2018.
Rimbaud l’avançait déjà dans sa lettre à Paul Demeny dès 1871, si « je est un autre », c’est que le sujet se construit dans sa relation à autrui. Et ce qui est vrai de la dualité des instances qui préside à la formation de la personnalité ne l’est pas moins du dialogue des cultures qui, dans le monde globalisé qui est aujourd’hui le nôtre, intervient pour modeler les frontières du sujet. Dans quelle mesure, dès lors que l’Autre est en nous, peut-on être soi en dehors de la référence à autrui ? Ce je que l’on aime à dire singulier est ontologiquement pluriel, produit de tensions fondatrices qui informent aussi la langue dont il se sert, la musique qu’il écoute, les films qu’il regarde ou les livres qu’il lit, toutes productions culturelles qui façonnent une vision du monde en jouant sur des codes identitaires, proposés à l’identification. Ce sont ces jeux complexes qui, selon que le contexte où ils interviennent est pacifié ou tendu, peuvent supposer assimilation ou distanciation, qui sont ici suivis dans leurs dimensions anthropologique, linguistique, politique, en un dialogue fructueux qui, dépassant le piège des identités meurtrières chères à Maalouf, entend mettre l’accent sur la nature heuristique de la rencontre.

Identités plurielles : relations, transitions, tremblements
(Laure Lévêque, dir.), Effigi, collection « Babel Transverses », 2019.
Si l’identité s’est longtemps entendue au singulier, fruit d’une ontologie essentialiste qui affirme avec la force d’un principe que « ce qui est est », avec son corolaire que « le non-être n’est pas », le freudisme n’a pas peu fait pour reconfigurer cette catégorie ontologique, en l’ouvrant à une pluralité de possibles qu’allait explorer, poussé dans ses retranchements par l’exercice de l’hégémonie, que celle-ci soit linguistique, politique ou de genre, le champ des subaltern studies, accouchant d’identités plurielles, atypiques, métissées, rhizomiques ou atopiques, que les contributions ici réunies s’emploient à éclairer.

Circulations méditerranéennes : voies, réseaux, modèles
(L. Lévêque, Y. Kocoglu, Th. Santolini, S. Visciola dir.), Arcidosso, Effigi, « La Recherche en Actes », 2018. (avec avant-propos)
« La Méditerranée, ce sont des routes », aimait à dire Lucien Febvre. Manière d’acter que, pour cette « mer au milieu des terres » à la confluence entre trois continents, l’élément liquide n’a rien d’un obstacle aux communications et tout d’un pont. Ce sont les conditions et les modalités de l’échange dans cet espace à la fois zone de convergence et de frictions qu’examinent les contributions ici réunies en suivant le commerce, belliqueux ou pacifique, des hommes, des esprits, des marchandises sur la longue durée d’une histoire partagée. Une histoire faite de flux, qu’atteste en diachronie la vitalité de circuits d’échanges éprouvés au fondement de la thalassocratie, mais aussi de reflux, quand l’actualité récente des mobilités indique que les biens sont mieux accueillis que les personnes, remettant en question l’héritage du Mare nostrum.

Vulnérabilités, échanges et tensions dans l’espace euroméditerranéen. L’Amer Méditerranée
(L. Lévêque, Ph. Bonfils, Y. Kocoglu, Th. Santolini, D. van Hoorebeke dir.), Paris, L’Harmattan, 2017.
Le présent ouvrage entend dépasser la facilité des stigmatisations et le portrait peu flatteur que certains médias brossent à l’envi, sur fond de poussée migratoire et d’exacerbation du radicalisme religieux, d’un espace euro-méditerranéen, politiquement déstabilisé, qui s’enfoncerait dans une crise économique endémique, ouvrant la voie à tous les aventurismes.
Au-delà de ces raccourcis, délaissant la corde sensible de l’émotionnel, il veut lutter contre une capitulation intellectuelle qui ne sert que le repli communautaire pour rendre sa place à l’analyse lucide, seule à même de redonner voix à un dialogue que ces rives savent multiséculaire.
C’est dans cette perspective d’ouverture que les contributions ici réunies s’intéressent à ce que pourraient être les conditions d’un multiculturalisme réussi, dont deux dimensions sont ici privilégiées : celle, épineuse et reparaissante, de conflits religieux qui, depuis les croisades au moins, n’ont cessé d’être instrumentalisés au service de causes moins saintes que profanes ; celle des modalités d’intégration dans un espace que les institutions internationales ne sont manifestement pas parvenues à unifier, laissant aux organisations privées la charge de reprendre à leur compte cette responsabilité sociale dont les sociétés civiles portent la demande pressante et qui paraît bien détenir la clé de la soutenabilité d’un avenir commun.

Babel, Littératures plurielles, n° 36 : La Méditerranée au pluriel. Cultures, identités, appartenances, 2e semestre 2017
(Hassen Bkhairia, L. Lévêque dir.).

Les échanges dans l’espace euro-méditerranéen : formes et dynamiques
(L. Lévêque, Ph. Bonfils, Y. Kocoglu, Th. Santolini, D. van Hoorebeke), Paris, L’Harmattan, 2016. (avec avant-propos)
Les analyses ici réunies questionnent plus particulièrement trois leviers de l’intégration au sein de sociétés euro-méditerranéennes plongées dans une crise systémique aux implications tant politiques que sociales dont les retentissements relèvent de ce qu’Amin Maalouf appelle « identités meurtrières » et se monnaient en un
malaise dans la civilisation
qui admet de multiples déclinaisons au fil d’une histoire marquée par des appétits coloniaux, que ceux-ci viennent du Nord ou du Sud : la question des langues qui, loin de la malédiction biblique qui condamne le babélisme, fait du multilinguisme un maillon cardinal dans la dialectique du même et de l’autre qui commande l’ouverture à autrui dans la permanence de soi à soi ; celle des politiques éducatives, décisives dans la formation de compétences sur lesquelles toute société entend asseoir son autorité, pour peu que ces compétences trouvent à s’investir dans le système ; celle, cruciale, des circulations dans un espace moins ouvert qu’il ne le dit où la nature de ces flux, touristiques ou migratoires, conditionne les termes de l’échange et le statut de ceux qu’il implique.

Continuité et rupture des échanges en Méditerranée. Histoire, religion, littérature, société
(J.-E. Bernard, N. Huchet, Y. Kocoglu, A. Leiduan, L. Lévêque dir.), Toulon, Babel « Transverses », 2016.
Cinq enseignants-chercheurs de l’Université de Toulon ont dirigé un ouvrage traitant de la continuité et de la rupture des échanges en Méditerranée sous quelques aspects historiques, religieux, littéraires et sociétaux.
« Pourrons-nous sauver la Méditerranée ? Pourrons-nous restaurer, ou mieux, développer sa fonction communicatrice ? Pourrons-nous remettre en activité cette mer d’échanges, de rencontres, ce creuset et bouillon de culture, cette machine à fabriquer de la civilisation ? ».
Lancé en 2013, ce cri d’alarme du sociologue Edgar Morin a su trouver une résonnance toute particulière chez plusieurs enseignants-chercheurs de l’Université de Toulon. Par leur travaux de recherches et leurs réflexions, Jacques-Emmanuel Bernard, Professeur de littérature ancienne et comparée, Nicolas Huchet et Yusuf Kocoglu, Maîtres de conférences en économie, Alessandro Leiduan, Maître de conférences en langue et littérature italienne ainsi que Laure Lévêque, Professeur de littérature française touchent du doigt cette problématique, chacun dans son domaine de compétence.
Afin de confronter leurs approches, ils ont organisé en septembre 2015 un colloque international sur le thème « Continuité et rupture dans les échanges en Méditerranée » : le Medworlds 7.
Des intervenants venus de plusieurs pays d’Europe, du Maghreb et des Etats-Unis, spécialistes de droit et d’économie, d’histoire et de littérature, se sont réunis sur le campus de Toulon pour aborder, selon une approche pluridisciplinaire, cette question si actuelle.
De ces rencontres, nait aujourd’hui un livre retraçant les échanges qui nourrissent encore les travaux de recherches des enseignants de l’UTLN : Continuité et rupture des échanges en Méditerranée.
Divisé en quatre chapitres (Histoire, Religion, Littérature et Société), cet ouvrage aborde notamment le sujet des migrants, la diffusion des jeux du cirque dans le monde romain, les interférences chrétiennes et musulmanes en Italie médiévale, le dialogue Nord/Sud au féminin ou encore la protection de l’eau dans le bassin méditerranéen.

L’Espace euro-méditerranéen entre conflits et métissages. Rencontres, échanges, représentations
(L. Lévêque, Ph. Bonfils, Y. Kocoglu, Th. Santolini, D. van Hoorebeke dir.), Paris, L’Harmattan, 2015.
À lire l’actualité, l’espace euro-méditerranéen évoque aujourd’hui massivement une zone de conflits, culturels, religieux ou économiques, plus ou moins ouverts, jusqu’à menacer le vivre ensemble de communautés que caractérisent pourtant, sur la longue durée, des pratiques d’échanges qui ont assuré, d’une rive à l’autre, une cohabitation renouvelée, sinon toujours pacifique.
Ce livre, qui bénéficie d’un éclairage élargi aux horizons disciplinaires de l’ensemble des sciences humaines et sociales, s’enrichit aussi des leçons des sciences de la Terre pour rappeler une communauté d’origine plurimillénaire, modelée dès les temps géologiques. C’est sur ces points de convergence qu’il s’essaie à mettre l’accent, en suivant le cours d’une histoire partagée.
Sans angélisme, mais fort d’une perspective humaniste.

Babel, Littératures plurielles, n° 30 : Paysages méditerranéens – correspondances poétiques, 2e semestre 2014
(L. Lévêque, Anaïs Escudier dir.).

Babel, Littératures plurielles, n° 29 : Horizons des mondes méditerranéen et atlantique, imaginaires comparés
1er semestre 2014.
(L. Lévêque dir.).
